lundi 23 août 2004, par CNAMTS, Quoi de neuf ?
Quoi de neuf ? Spécial Réforme de l'Assurance Maladie
Après trois semaines de débat à l'Assemblée nationale et une semaine devant le Sénat, la loi réformant l'assurance maladie a été définitivement adoptée le 30 juillet 2004.
Elle a fait l'objet d'un recours devant le Conseil constitutionnel qui l'a déclarée conforme à la constitution. Deux réserves d'interprétation ont toutefois été émises.
Publiée au journal officiel du 17 août, cette loi qui comprend 76 articles répartis en trois grands volets (organisation de l'offre de soins et maîtrise médicalisée des dépenses de santé, organisation de l'assurance maladie et dispositions relatives au financement) doit désormais être mise en œuvre. De nombreux décrets d'application et arrêtés seront donc prochainement publiés. Ils viendront préciser les modalités d'application de ce texte.
Voici quelques points phares de cette réforme. Ce document n'est donc pas exhaustif.
Au plus tard le 1er juillet 2007, chaque assuré sera titulaire d'un dossier médical personnel constitué de données de santé recueillies à l'occasion de son parcours de soins. Cela permettra le suivi des actes et prestations de soins.
L'accès au dossier sera interdit en dehors du suivi médicalisé (ex: médecin du travail ou conclusion d'un contrat de complémentaire santé).
Le niveau de prise en charge des dépenses engagées par l'assuré social sera subordonné à l'autorisation qu'il donnera au professionnel de santé d'accéder à son dossier.
Cette modulation du taux de prise en charge sera définie par l'UNCAM (Union Nationale des Caisses d'Assurance Maladie) dans des limites fixées par décret en Conseil d'Etat. (art. 3)
Pour bénéficier de l'exonération totale ou partielle du ticket modérateur, le patient en affection de longue durée (ALD) devra (hors cas d'urgence) présenter au médecin consulté le protocole de soins établi par le médecin traitant et le médecin-conseil de la caisse qu'il aura dûment signé.
Par ailleurs, le protocole de soins doit mentionner les obligations imposées aux bénéficiaires d'une ALD, à savoir :
- se soumettre aux traitements prescrits d'un commun accord par le médecin traitant et le médecin- conseil,
- se soumettre aux visites médicales et contrôles spéciaux organisés par la caisse,
- s'abstenir de toute activité non autorisée et accomplir les exercices prescrits en vue de favoriser sa rééducation ou son reclassement professionnel.
Les conditions dans lesquelles l'Assurance maladie prend en charge les soins ou traitements susceptibles de faire l'objet d'un usage détourné (ex : subutex®) ont été précisées. Une obligation est faite au patient d'indiquer au médecin traitant, à chaque prescription, le nom du pharmacien qui sera chargé de la délivrance. Le médecin doit mentionner ce nom sur la prescription qui doit alors être exécutée par le pharmacien concerné pour ouvrir droit à la prise en charge. (art. 17)
Tout assuré ou ayant droit d'au moins 16 ans devra choisir un médecin traitant (généraliste ou spécialiste) pour bénéficier du ticket modérateur de droit commun.
Si l'assuré n'a pas effectué ce choix ou s'est adressé directement à des médecins relevant de certaines spécialités, le ticket modérateur pourra être majoré. La majoration ne sera pas appliquée, notamment, lorsqu'il est mis en œuvre un protocole de soins (patient en ALD) et en cas d'urgence
(art. 7).En outre, les médecins spécialistes consultés directement " seront autorisés " " à pratiquer des dépassements d'honoraires sur le tarif des actes et consultations ";
(art. 8). Cependant, certaines spécialités, qui restent à préciser par arrêté, resteront en accès direct (ex: pédiatrie, ophtalmologie,..).Les dépassements d'honoraires resteront à la charge du bénéficiaire de la CMU complémentaire qui consulterait directement un médecin spécialiste
(art. 10).
La franchise est due aussi bien par les assurés malades que par les accidentés du travail ou victimes de maladie professionnelle mais tout assuré verra sa participation plafonnée, par décret, à un " nombre maximum de participations forfaitaires ".
Seront toutefois exonérées, les personnes hospitalisées (sauf dans le cadre des urgences hospitalières ou consultations externes), les ayants droit de moins de 16 ans, les bénéficiaires de la CMU complémentaire, les femmes prises en charge par l'assurance maternité
(art. 20).Le montant de la participation sera fixé par décret. Il sera a priori, dans un 1er temps, de 1 €.
Pour inciter les organismes complémentaires maladie à ne pas prendre en charge ce forfait, le bénéfice de l'exonération de charges sociales sur les primes ou cotisations et de l'exonération de taxe sur les conventions d'assurance sera réservé aux contrats répondant à un cahier des charges fixant à la fois un niveau minimal de couverture et des exclusions de prise en charge (comme celle liée à la franchise). Le cahier des charges entrera en vigueur pour tous les contrats concernés à compter du 1er janvier 2006 (art. 57).
A compter du 1er janvier 2005, mise en place d'une aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire santé pour les personnes qui, du fait de leurs faibles ressources, en sont actuellement privées
. (art.56)Un crédit d'impôt sera ouvert pour les contrats d'assurance complémentaire de santé individuels souscrits auprès d'un organisme complémentaire par les personnes dont les ressources sont comprises entre le plafond en vigueur pour la CMU complémentaire et ce même plafond majoré de 15 %.
Le montant du crédit d'impôt variera selon le nombre et l'âge (l'âge étant apprécié au 1er janvier de l'année) des personnes composant le foyer.
La gestion de ce crédit d'impôt est confiée au fonds de financement de la CMU complémentaire. Les dépenses du fonds de financement de la CMU seront financées par une dotation globale de l'assurance maladie.
Le versement des indemnités journalières sera suspendu lorsque l'assuré ne se soumettra pas à l'obligation de contrôle organisé par le service du contrôle médical
(art. 27). La caisse informera alors l'employeur de cette suspension. L'employeur aura alors la faculté de suspendre l'indemnisation complémentaire.En outre, les obligations mises à la charge du bénéficiaire d'indemnités journalières (observer les prescriptions du médecin, se soumettre aux contrôles, respecter les heures de sortie et s'abstenir de toute activité non autorisée) ne figurent plus dans le règlement intérieur des CPAM mais dans la loi afin de leur donner plus de force.
Si ces obligations ne sont pas respectées, les IJ pourront en tout ou partie être retenues. Un contrôle juridictionnel, relevant des juridictions de sécurité sociale, pourra s'effectuer, en cas de recours, " sur le montant de la sanction prononcée et son adéquation à l'importance de l'infraction commise par l'assuré ". Le paiement indu d'indemnités en espèces sera récupéré en un ou plusieurs versements ou part retenue sur les prestations à échoir " en fonction de la situation sociale du ménage " (art. 29).
Par ailleurs, le renouvellement d'un arrêt de travail sera désormais encadré. Le maintien de l'indemnisation est conditionné à la prolongation de l'arrêt par le même médecin prescripteur de l'arrêt initial (art. 28).
Enfin, de nouvelles possibilités d'aide sont offertes à l'assuré pour favoriser sa reprise de travail
(art. 24).
Les informations inscrites dans la carte Vitale (actes effectués, produits délivrés, prestations servies) seront désormais accessibles au médecin. Une photographie sera apposée sur la carte Vitale 2. La faculté pour les établissements de santé de demander à l'assuré d'attester de son identité est légalement prévue.
Le renforcement de l'information délivrée aux assurés sociaux
L'information à communiquer aux assurés sur l'offre de soins disponible est renforcée
(art. 18). Cela s'inscrit dans une démarche de transparence du système de santé et de promotion de la qualité des soins. L'information donnée aux assurés inclut désormais :l'adhésion aux contrats individuels de bonne pratique,
l'adhésion aux contrats de santé publique,
l'adhésion aux contrats de promotion des bonnes pratiques
la participation à des actions de formation continue,
la participation à des actions d'évaluation des pratiques professionnelles.
Cette mission d'information est confiée aux différents régimes d'assurance maladie. Les vecteurs d'informations utilisés restent à définir.
L'information sur le coût des prestations
Cet article crée l'obligation pour les pharmaciens d'informer l'assuré social porteur de la carte Vitale du coût, pour les régimes d'assurance maladie, des médicaments prescrits. Un décret précisera les conditions de cette obligation de communication.
(art. 22).Parallèlement, sur le premier décompte de l'année civile envoyé à l'assuré devra figurer le montant des dépenses engagées par celui-ci au cours de l'année civile précédente.
(art. 22).
Les abus ou fraudes feront l'objet d'une pénalité financière. Cette sanction pourra être prononcée à l'égard d'un patient par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie dont la demande de remboursement ou le remboursement est indu
(art. 23).Les caisses d'assurance maladie sont autorisées à récupérer le montant des prestations indûment versées aux assurés (sous réserve que l'assuré n'en conteste pas le caractère indu) par un ou plusieurs versements ou par retenue sur les prestations à venir en fonction de la situation sociale du ménage
(art. 29).
La loi refond le dispositif conventionnel et supprime le règlement conventionnel minimal (RCM) applicable aux spécialistes en l'absence de convention.
La convention ou un quelconque accord conventionnel interprofessionnel, est signée entre une organisation syndicale représentant les professionnels de santé et l'union nationale des caisses d'assurance maladie.
En cas de refus majoritaire, les professionnels de santé peuvent s'opposer à cette signature, dans le mois qui suit, par le biais d'au moins deux organisations syndicales représentant pour les médecins la majorité absolue des suffrages exprimés aux dernières élections aux unions régionales, pour les médecins exerçant à titre libéral.
Pour les autres professions de santé, les organisations désirant s'opposer à la signature doivent représenter au moins le double des effectifs de professionnels libéraux représentés par les organisationssyndicales signataires.
Pour les médecins libéraux
Les professionnels de santé ou les centres de santé qui s'installeront dans les zones rurales et urbaines sous-médicalisées pourront bénéficier d'une rémunération forfaitaire annuelle. C'est la convention qui définira des dispositifs d'aides à l'installation de ces professionnels de santé libéraux.
Pour tous les professionnels de santé
Par ailleurs, les conditions de participation des caisses d'assurance maladie au financement des cotisations (
sociales, familiales, assurance vieillesse, maladie, maternité et décès) seront désormais fixées dans la convention.L'assiette, le niveau de participation ainsi que les modalités de calcul et de répartition entre les régimes seront également définis par la convention, de même que " les modalités de leur modulation en fonction du lieu d'installation ou d'exercice ". (art.49)
La télémédecine est définit
(art.32) et la transmission par courrier électronique d'une ordonnance comportant des prescriptions de soins ou de médicaments est autorisée sous certaines conditions. (art.34)
Il est instauré de nouvelles règles pour les professionnels de santé, qui doivent notamment se plier à un contrôle plus stricte.
Les médecins auront désormais l'obligation, sous peine de sanctions, de se soumettre à un contrôle régulier de leur pratique professionnelle, organisé soit par la Haute autorité de santé, soit par un dispositif mis en place par décret
. (art.14)Ces sanctions sont celles déjà prévues par le code de la Santé publique.
Il sera possible d'obliger un médecin à passer par un contrôle préalable de la CPAM pour la prescription de transports sanitaires ou d'arrêts maladie pendant une période de 6 mois au plus (sauf en cas d'urgence attestée).
(art. 25)Les abus ou fraudes feront l'objet d'une pénalité financière. Cette sanction pourra être prononcée à l'égard du professionnel de santé, par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie dont la demande de remboursement ou le remboursement est indu
(art. 23). Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale et il est doublé en cas de récidive.
Création d'une Union nationale des Caisses d'assurance maladie (UNCAM) et d'une Union nationale des organismes d'Assurance maladie complémentaires (UNOAMC).
L'UNCAM coordonne l'action de la CNAM, CANAM et de la CCMSA, définit les conditions de remboursement des actes et des prescriptions et fixe leur tarif.
L'UNOAMC sera consultée sur les décisions de l'UNCAM en matière d'inscription au remboursement des actes et prestations et de fixation de la participation des assurés.
Par ailleurs, un partenariat accru est instauré entre le régime obligatoire et les régimes complémentaires, notamment autour de la négociation conventionnelle avec les professions de santé et les centres de santé, mais aussi pour la définition d'actions communes dans la gestion du risque.
Création d'une Haute autorité de santé chargée d'évaluer "produits, actes ou prestations de santé" . Ces études contribueront aux décisions de remboursement. Elle reprendra notamment les missions de l'ANAES au 1er janvier 2005, cette dernière étant supprimée
(art. 35 et 36).
Création du Conseil de l'hospitalisation. Il contribuera à l'élaboration de la politique de financement, et à la réalisation des objectifs de dépenses d'assurance maladie relative aux frais d'hospitalisation
(art. 45).Il devra être saisi pour recommandation avant toute décision gouvernementale sur la politique de financement des établissements publics de santé
(art. 64).Un Institut des données de santé est constitué. Il veillera à la qualité des systèmes d'informations utilisés pour la gestion du risque maladie et au partage des données, en respectant l'anonymat.
Création d'un Observatoire des risques médicaux recueillant les données relatives aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales
(art. 15).
Ce comité a été créé afin d'alerter le parlement, le gouvernement et les caisses d'assurance maladie en cas d'évolutions des dépenses d'assurance maladie incompatible avec ce qui a été voté par le parlement.
(art. 40).
16 juin 2004
: présentation du projet en Conseil des Ministres29 juin 2004
: début du débat parlementaire en séance publique à l'Assemblée nationale20 juillet 2004
: vote du projet de loi à l'Assemblée nationale27 juillet 2004
: vote du projet de loi au Sénat30 juillet 2004
: adoption définitive du projet de loi au Parlement12 août 2004
: validation de la réforme de l'assurance maladie par le Conseil constitutionnel17 août 2004
: publication de la loi au Journal Officiel (n° 190)
Calendrier prévisionnel de mise en place des principales mesures de la réforme :